1866
Naissance à Kiev, le 31 janvier (le 13 février d’après
l’ancien calendrier russe), de Lev Isaakovitch Schwarzmann (connu sous le
pseudonyme littéraire Lev Chestov), le premier fils d’une famille
juive très respectée. Son père, Isaak Moisseevitch Swarzmann,
issu d’un milieu très modeste, est à la tête d’une
importante affaire de tissus qu’il a lui-même créée.
Sa maison est le lieu de rencontre des plus importantes figures culturelles de
Kiev et de St. Petersbourg. Il a une forte personnalité forte, et la reputation
d’un libre penseur dans la communauté juive. Ses connaissances exceptionnelles
de la litérature hébraique et, plus généralement,
de la tradition juive, vont profondément marquer Lev Isaakovich, dont l’oeuvre
se concentrera plus tard sur l’alliance paradoxale entre le judaïsme
et l’orthodoxie (en tant qu’opposés au rationalisme grec).
1880 - 1883
Etudes sécondaires à Kiev, puis à Moscou (- à la
suite de sa participation à une affaire politique, il doit quitter Kiev
et il finit ses études à Moscou).
1884
Il s’inscrit à la Faculté de mathématiques, mais
il se fait très vite transférer dans la Faculté de droit
de l’Université de Moscou. Un autre conflit avec les autorités,
cette fois représentées par un inspecteur des étudiants de
sombre notoriété, force Lev Isaakovich à rentrer à
Kiev.
1889
Fin de ses études universitaires avec le titre de Kandidat prav. Présentation
à Kiev d’une thèse de doctorat consacrée à l’étude
de la législation ouvrière en Russie. Il ne peut obtenir le titre
de docteur en droit, parce que le contenu de sa thèse est jugé ‘révolutionnaire’,
et la soutenance est interdite par la censure. L’Université de Kiev
accepte pourtant sa thèse, et son nom est inscrit sur la liste officielle
des avocats de St. Petersburg, mais Lev Isaakovich ne s’intéresse
pas à la possibilité de poursuivre une carrière d’avocat.
1890-1891
Service militaire. Stage chez un avocat à Moscou.
1891-1892
Retour à Kiev pour sauver l’entreprise de son père menacée
de faillite. C’est aussi une période de désarroi, quand il
se trouve confronté à un dilemme moral. Il commence une liaison
clandestine avec Aniouta Listopadova, une jeune femme russe d’origine orthodoxe,
qui est employé par la famille Schwarzman. De cette relation, un fils (Serghei
Listopadov) est né en 1892, et cela ne fait qu’exacerber la lutte
que mène Lev Isaakovich pour défendre ses propres aspirations contre
l’autorité inflexible de son père.
1892-1894
Continue à travailler dans l’entreprise familiale, et publie quelques
articles sur des questions financières et économiques. Période
de lectures littéraires et philosophiques. Découverte de sa vocation
d’écrivain. Il fréquente les cercles littéraires de
Kiev et de Moscou, et il rencontre une jeune femme écrivain de talent,
Varvara Grigoryevna Malakyeva-Mirovitch, qui allait passer l’été
1895 avec la famille Schwarzmann, en tant que tuteur des enfants de la soeur de
Lev Isaakovich, Sophia Balahovskaya.
1895
Publication à Kiev de ses premiers travaux non signés, sur des
sujets littéraires et philosophiques : Вопрос
совести (O Владимире
Соловиове) [Le Problème
de la conscience (à propos de Vladimir Soloviov)], et Георг
Брандес о Гамлете
[Georg Brandes sur Hamlet].
Vers la fin de l’année, il souffre d’une dépression
nerveuse (due, en partie, au conflit de plus en plus grand entre ses aspirations
personnelles et la responsabilité liée à la gestion de l’entreprise
familiale). Tout de même, la façon mystérieuse dont il decrira
plus tard cet événement dans son journal fait penser à une
crise personnelle beaucoup plus grave, probablement en rapport avec une série
de déceptions intellectuelles et émotionnelles. Surtout, une source
de chagrin considérable semble avoir été l’incrédulité
et le refus obstiné que suscita l’aveu de son attachement amoureux
à Varvara Grigorievna (ainsi que l’indique leur correspondance).
1896
Il part en Suisse pour se soigner. Il se consacre à son travail littéraire.
Pendant son voyage à travers l’Europe, il fait des séjours
succesifs près de Vienne, à Carlsbad, à Berlin, au Tréport,
à Paris, à Munich et de nouveau à Berlin. Il travaille à
son premier livre, Шекспир у
его критик Брандес
[Shakespeare et son critique Brandes]. A Rome, il rencontre Anna Eleasarovna Beresovskaya,
une étudiante en médicine, qui deviendra sa femme.
1897
Installation à Rome, et rédaction définitive de Шекспир
у его критик Брандес
[Shakespeare et son critique Brandes].
Mariage avec Anna Eleasarovna Beresovskaya, à l'insu de ses parents qui
n'auraient jamais admis que leur fils épousât une jeune fille de
religion orthodoxe. La même année, leur fille, Tatyana, est née.
Pendant dix ans les époux vivent dans des villes différentes pour
éviter que les parents Schwarzmann aient connaissance de leur mariage.
1898
Шекспир у его
критик Брандес
[Shakespeare et son critique Brandes] est publié à frais d'auteur,
chez A. Mendeleevitch in St. Petersbourg. Il signe pour la première fois
avec le pseudonyme Lev Chestov, ce qui indique la rupture symbolique avec l'autorité
du père – ainsi que Chestov le mentionne dans ses conversations avec
son ami, Aron Steinberg, qui ont été reproduites dans le livre de
celui-ci, Друзия моих
ранник лет (Mes amis
des années de jeunesse).
Départ d’Italie et installation en Suisse. Rédaction de son
deuxième livre, Добро в учении
гр. Толстого и
Фр. Нитше [L’Idée de
Bien chez le Comte Tolstoï et chez F. Nietzsche], qu'il termine à
la fin de l'année.
Retour en Russie. Le livre Шекспир
у его критик Брандес
[Shakespeare et son critique Brandes] passe à peu près inaperçu.
1899
Séjour à Saint-Petersbourg et à Kiev. Il entre en contact
avec les milieux littéraires.
Publication du livre Добро в учении
гр. Толстого и
Фр. Нитше [L'Idée de Bien
chez le Comte Tolstoï et chez F. Nietzsche](édition datée
de 1900) avec bien des difficultés et grâce à la recommandation
de Vladimir Soloviev.
1900
En janvier, il part de Russie en Suisse, puis en Italie (Nervi), où
il se consacre à son travail littéraire, notamment à son
troisième livre, Достоевский
и Нитше [Dostoïevski et Nietzsche].
Sa fille, Nathalie, est née.
N.K. Mihaylovky publie deux essais importants sur Добро
в учении гр. Толстого
и Фр. Нитше [L'Idée
de Bien chez le Comte Tolstoï et chez F. Nietzsche], dans le numéro
de février-mars de la revue Русское
богатство, ce qui attire
l’attention du public et de la critique littéraire. G.Tchelpanov
et Vodovozov, parmi d’autres, participent à un débat organisé
à Kiev au sujet du livre de Chestov.
En mai, S. Diaghilev, rédacteur de Мир искусстба
[L'Univers de l'art] propose à Chestov de collaborer à sa
revue. Chestov lui envoie le manuscrit de son livre, Достоевский
и Нитше [Dostoïevski et Nietzsche],
ainsi que deux articles polémiques à propos du livre de Merejkovsky,
Лев Толстой и
Достоевский
[Lev Tolstoï et Dostoïevski].
1901
En septembre, il rentre à Kiev, où il reste jusqu'en 1908. Il
travaille dans l'entreprise familliale, et fait des voyages à Moscou et
à St. Petersbourg. Il fait des conférences, participe à des
débats. A Kiev, il se lie d'amitié avec N. Berdiaev, S. Boulgakov,
A. Lazarev, G. Tchelpanov. Il est aussi proche de certaines personnalités
de St. Petersbourg, ainsi que D. Merejkovsky, V. Rozanov, Z. Vengerova, and later,
with Remizov (un de ses amis et correspondants de toute une vie).
1902
Достоевский
и Нитше [Dostoïevski et Nietzsche]
est publié dans six numéros de Мир искусства
[L'Univers de l'art].
1903
Publication chez Stassjulevitch (St. Petersbourg) de Достоевский
и Нитше [Dostoïevski et Nietzsche]
sous forme d'un livre et d'une étude sur ‘Jules César’
de Shakespeare. Période de lectures et d'étude. Projet d'un livre
(le futur Апофеоз беспочвенности
– L'Apothéose du déracinement), mais le travail de
l'entreprise familiale l'empêche d'en mener à bien la rédaction.
En février, il publie dans la revue Мир искусства
[L'Univers de l'art] une critique acerbe du livre de D.Merejkovsky,
Лев Толстой и
Достоевский
[Lev Tolstoï et Dostoïevski], t. II.
Au printemps il part pour la Suisse afin de travailler à la rédaction
de Апофеоз беспочвенности
[L'Apothéose du déracinement].
En novembre il est rappelé à Kiev par la maladie de son père.
1904
Rédaction de Апофеоз беспочвенности
[L'Apothéose du déracinement] . Travail dans l'entreprise
familiale.
1905
Publication de Апофеоз беспочвенности
[L'Apothéose du déracinement] en février.
Le livre suscite des vives controverses en Russie. Des compte-rendus de I. Eihenvald,
N. Berdiaev, A. Remizov, et V. Rozanov paraissent dans les plus prestigieuses
revues de l'époque.
En mars, Chestov publie un article sur A.Tchekhov, 'Творчество
из Ничего' [La Création
ex nihilo], le meilleur article consacré à cet écrivain
selon I. Bounine. Des commentaires très favorables aussi de la part de
R. Ivanov-Razumnik et A. Bel'yi.
Parution d'une longue étude de N. Berdiaev sur Chestov dans Вопросы
жизни, ainsi que de plusieurs articles (en particulier
de V.Bazarov et de V.Rozanov), dans la même revue.
1906
En janvier, il publie un article sur Dostoïevski.
1907
En avril, il publie quelques aphorismes et l’article, 'Похвала
глупости' [Eloge de la bêtise],
consacré à N.Berdiaev.
1908
Transformation de l'entreprise de la famille Schwarzmann en société
par action dont il prend la direction, en espérant que cette nouvelle organisation
lui laissera d'avantage de liberté.
En septembre, il publie Начала и
концы [Les Commencements et les fins],
recueil d'articles parus dans les revues entre 1905 et 1907. Le même mois
paraît une longue étude sur Chestov de R.Ivanov-Razumnik (О
смысле жизни,
'Le Sens de la vie', St. Petersbourg : M. Stassiulevitch, 1908, pp. 162-256).
En octobre, il commence à rediger Великие
кануны [Les Grandes Veilles], à
Fribourg-en-Brisgau, où il s'est installé avec sa famille.
Parution, pendant les deux derniers mois de l'année, d'un article de D.
Filosofov dans Московский
еженедельник
(n° du 15 déc.), et d'un article de S. Frank dans le quotidien Слово
(n° du 10 déc.) qui critiquent violemment les oeuvres de Chestov.
1909
En janvier, il publie une étude à l'occasion du 80ème
anniversaire de L.Tolstoï, Разрушающиий
и созидающий
миры [Celui qui détruit et celui qui construit
des mondes].
1910
Le 2 mars, il rend visite à L.Tolstoï dans son domaine de Iasnaia
Poliana.
En avril, il quitte Kiev et s'installe avec sa famille en Suisse sur les bords
du lac Léman (Coppet, Villa des Saules) où il restera avec sa famille
jusqu'en juillet 1914. Là, pendant quatre ans, il connaîtra une relative
tranquilité, surveillant de loin l'entreprise, et pourra se consacrer aux
études, entamées à Fribourg, sur la philosophie grecque,
les mystiques du Moyen Age, Luther, et des théologiens tels que A. von
Harnack, H. Grisard, H. Denifle.
A la fin de l'année son livre, Великие
кануны [Les Grandes Veilles] (rassemblant
essentiellement les articles publiés en 1909 et 1910) est publié
par l'édition Chipovnik, qui entreprend la publication des oeuvres complètes.
1911-1912
Années d'études à Coppet.
1913-1914
Rédaction de Sola Fide qui témoigne d'une nouvelle orientation,
plus philosophique que littéraire de son oeuvre.
1914
Départ de Coppet avec sa famille pour revenir en Russie. Sa bibliothèque
et la version non définitive de Sola Fide, saisies par la douane du fait
de la déclaration de la guerre, sont renvoyées en Suisse. Il en
reprendra possession lorsqu'il émigrera de Russie en 1920.
Il s'installe à Moscou (Novokoniouchennyi per., n° 14), et prend contact
avec les milieux littéraires et philosophiques parmi lesquels il retrouve
de nombreux amis (Viatcheslav Ivanov, S. Boulgakov, N. Berdiaev, G. Chpet, G.
Tchelpanov, M. Guerchenson, S. Lourié, N. Butova, les soeurs Evguenia and
Adelaida Guertsyg etc.).
1915
Rédaction de Potestas Clavium dans lequel sont repris certains
sujets déjà traités dans Sola Fide.
En février, il est élu membre de la Société de Psychologie
de Moscou, un des centres d'études de philosophie religieuse de Moscou.
En novembre, il fait une conférence dans cette Société intitulée
‘Potestas Clavium’.
1916
Le 4 novembre il fait une conférence sur Viatcheslav Ivanov, qui suscite
des vifs débats.
1917
Vers la fin de l'année, il publie un article sur E. Husserl, intitulé
‘Memento Mori’.
Pendant la révolution de février il se trouve à Moscou. Il
ne partage pas l’enthousiasme général. Il publie 38 aphorismes
dans diverses revues, et écrit peu. Le climat politique lui pèse.
Il est toujours à Moscou pendant la révolution d’octobre.
Son fils, Serghei Listopadov, qui était dans l’armée, est
tué au combat. Chestov va le chercher au front, mais, en dépis des
efforts soutenus, n’arrive pas à le trouver.
1918
Il quitte Moscou, où la vie est devenue très dure, et s’installe
à Kiev, chez sa soeur Sophie Balachovski.
En hiver, il travaille en tant que professeur à l’Université
populaire de Kiev où il donne un cours sur la philosophie grecque, cours
qu’il continuera en 1919.
1919
En janvier, il rédige la version définitive du livre Potestas
Clavium qui ne paraîtra qu’en 1923, à Berlin.
En automne il part avec sa famille à Yalta (Crimée) où il
attendra l’occasion de se rendre en Suisse. Il est conférencier à
l’Université de Simferopol.
1920
En janvier, il part avec sa famille à Sevastopol. Là-bas, il
obtient des places sur un bateau français qui les emmenera à Constantinople,
d’où il voyagerons à Gêne, puis à Paris, et enfin,
à Genève.
Installation à Genève où Chestov et sa famille sont hébergés
par Mme Lowtzky, soeur de Chestov.
Rentre en possession de sa bibliothèque et du manuscrit de Sola Fide, don’t
il recopie la fin de la première partie consacrée à Tolstoï
: il y apporte quelques retouches et lui donne le titre 'Откровения
смерти' [Les Révélations
de la mort], qu'il changera plus tard en 'Ha страшном
суде' [Le Jugement dernier]. The former title
était déjà affecté à une étude qui comprenait
l'article ci-dessus sur Tolstoï et un article sur Dostoïevski (voir
la bibliographie). Chestov ne publie pas de son vivant les autres parties du livre,
peut-être parce que certaines idées avaient été reprise
dans Potestas Clavium. La deuxième partie de Sola Fide a été
publiée en français en 1957 et l'ensemble du livre en russe en 1966
d'après la version non définitive retrouvée dans les papiers
de Chestov après sa mort.
Nombreux soucis matériels (installation des membres de sa famille qui avaient
émigré, angoisse provoquée par les événements
de Russie).
1921
En avril, il quitte Genève pour s’établir en France, à
Clamart. C’est le début de sa plus longue période en exile,
qui durera jusqu’à sa mort.
De mai à septembre, il écrit un article à l’occasion
du 100ème anniversaire de Dostoïevski, 'Преодоление
самоочевидностей'
[Le dépassement des évidences].
En novembre, il s’établit avec sa famille dans un modeste appartement
de Paris (au 7, rue Sarasate, 15ème).
1922
En février, un important extrait de son article sur Dostoïevski
('Преодоление
самоочевидностей',
'Le dépassement des évidences') est publié dans la Nouvelle
Revue Française. Cette publication contribuera d’une façon
décisive à la réception de Chestov en France. Boris de Schloezer,
son ami d’une vie et le traducteur le plus asiduu de son oeuvre en France,
est l’auteur de la traduction, ainsi que de l’introduction à
l’article de Chestov pour la NRF. Dans le même numéro de février
de la revue paraissent un article de A. Gide et un article de J. Rivière,
ainsi que plusieurs textes de Dostoïevski.
Il fait une série de conférences sur Dostoïevski, et sur la
philosophie antique, à la Société pour la religion et la
philosophie et à l’Université populaire.
Il fréquente mes écrivains russes émigrés. Il est
membre du Groupe académique créé par les professeurs émigrés.
Le peintre Sorine fait son portrait (actuellement au Metropolitan Museum de New
York). Il entre en contact avec les mileiux littéraires français.
Il fait plusieurs voyages à Berlin où s’est établi
un important groupe d’émigré russes. La maison d’édition
Skify installé à Berlin entreprend la publication de plusieurs de
ses livres.
En avril, il est nommé professeur à la faculté russe des
lettres près de l’Université de Paris (Section russe de l’Institut
d’études slaves). Donne un cours de philosophie à partir d’avril
1922 jusqu’en mars 1936 (octobre).
En octobre, Boris de Schloezer publie une importante étude sur Chestov
(‘Un penseur russe : Léon Chestov’) dans le Mercure de France.
1923
En mai, son livre, Les Révélations de la mort, est publié
chez Plon dans la collection d’auteurs étrangers dirigée par
Charles du Bos.
En juin, une étude de Chestov, 'Descartes et Spinoza', paraît dans
le Mercure de France et seulement deux ans plus tard en russe dans la revue Современие
записки dont certains rédacteurs
n'approuvaient pas les idées de Chestov.
En juin, La Nuit de Gethsémani est publié chez Grasset. Daniel Halévy,
le directeur des Cahiers verts avait demandé à Chestov d'écrire
cet essai à l'occasion du 300ème anniversaire de Pascal. Les deux
premiers livres de Chestov en traduction française ont eu une bonne reception,
et des compte-rendus élogieux sont parus dans Mercure de France (par Masson
Oursel) et dans La Nouvelle Revue Française (par A. Thibaudet).
Entre le 24 août et le 3 septembre, il participe aux Entretiens de Pontigny
où il assiste à la décade Le Trésor poétique
réservé ou l'intraduisible sur l'invitation de Paul Desjardin,
directeur des décades de Pontigny, et de Charles de Bos, qui deviennent
ses amis.
Il fait une série de conférences à la Sorbonne, sur Les Idées
de Dostoïevski et de Pascal, qu'il reprendra pendant la prochaine année
académique, 1924-5.
1924
Au printemps il participe pour la première fois aux soirées organisées
par le philosophe Jules de Gaultier. Il y rencontre l'écrivain français
d'origine roumaine, Benjamin Fondane, qui avait publié une série
d'articles sur Chestov avant son arrivée pour Paris. Fondane deviendra
son ami proche et son seul disciple, en contribuant de façon significative
à la dissemination de ses idées en France. Il lui consacrera plusieurs
études et un livre écrit en sa mémoire, Rencontres avec Chestov.
En novembre, il démenage à une nouvelle adresse à Paris,
au 41, rue de l'Abbé Grégoire.
1926
En janvier, il s'installe chez sa soeur, Mme Sophie Balachowski qui occupe
1, rue de l'Alboni, Paris 16ème, un spacieux appartement.
Début d'une large collaboration à la Revue philosophique dirigée
par Lucien Lévy-Bruhl. Son premier article, Memento Mori, qu'il avait publié
en Russie en 1917, est publié en français dans le numéro
de janvier-février de la Revue philosophique, et constitue une des premières
interprétations de la pensée de Husserl en France. Jean Hering repond
à Chestov et à sa critique existentielle de Husserl en écrivant
l'article ‘Sub speciae aeterni’. Hering envoie le manuscrit de son
article à Chestov qui écrit une réponse, 'Что
такое истина'
(Qu’est-ce que la vérité ?). Leur polémique marque
un des moments les plus important de la reception de Husserl en France.
Il resserre les lien établis les années précédentes
avec le monde littéraire et philosophique français et allemand.
Organise des réceptions où se rencontrent homme de lettres et philosophes.
Il voyage fréquemment en Allemagne où il est membre de la Kantgesellschaft
et de la Nietzschegesellschaft.
Les Editions de la Pléiade entreprennent de publier les oeuvres complètes
de Chestov. Malgré sa notoriété acquise, il a des grosses
difficultés à se faire éditer, et seulement trois volumes
de l'édition de la Pléiade seront publiés de son vivant.
Il commence à rediger На весах
Иова [Dans la balance de Job], qu’il
terminera l’année suivante. Il écrit aussi 'Скованный
Парменид' [Parmenide enchaîné],
qui fera plus tard partie de Афины и Иерусалим
[Athène et Jérusalem].
1927
Le deuxième article de Chestov sur Husserl, 'Qu'est-ce que la vérité?'
paraît dans le numéro de janvier-février de la Revue philosophique.
Quelques mois plus tard, le même article est publié en allemand,
dans le Philosophischer Anzeiger (n° 1, 1927). Le même numéro
de cette revue contient l'article de J.Hering, qui sera ultérieurement
publié en français (Revue d'histoire et de philosophie religieuse,
juillet/août 1927, n° 4).
1928
Entre le 15 et le 23 avril, Chestov participe à un congrès philosophique
à Amsterdam où il fait une communication sur Plotin et se lie avec
E. Husserl, intéressé par l'article que Chestov lui avait consacré,
malgré la violence de son attaque. Les deux hommes se rencontreront souvent
jusqu'en 1933, soit à Fribourg, chez E. Husserl, soit à Paris où
E. Husserl a été invité plusieurs fois à donner des
conférences à la suite de démarches faites par Chestov.
Vers la fin de l'année, il fait une conférence sur Tolstoï
à Fribourg. Husserl et Heidegger y sont présents. Après la
conférence, Chestov parle avec Heidegger de la philosophie existentielle,
chez Husserl.
Chestov découvre ses affinités intéllectuelle profondes avec
l'oeuvre de Kierkegaard, grâce à Husserl.
1929
En avril, il s’installe au 3, rue Letellier, Paris 15ème.
En mai, il publie На весах Иова
[Sur la balance de Job] qui rassemble les études écrites
à Genève et à Paris entre 1920 et 1927 et publiées
partiellement.
1930
En septembre il déménage après le mariage de ses filles,
à Boulogne-sur-Seine, au 19, rue Alfred Laurent, où il restera jusqu'à
sa mort. Il mène une vie relativement retirée et, quoique souvent
souffrant, reste en pleine activité créatrice.
1931
Publication à Amsterdam d'une thèse de J.Suys sur Chestov.
1932
En mai, il fini de rédiger l'étude 'В Фаларийском
быке' [Dans le taureau de Phalaris], commencée
probablement en 1930, et dont les derniers chapitres sont consacrés à
Kierkegaard.
1935
Il termine la rédaction de son étude sur Kierkegaard, Киркегард
и эгзистенциальная
философии [Kierkegaard
et la philosophie existentielle], commencée en 1930 ou 1931.
En février, il termine son étude, 'О средневековой
философии' [Sur la philosophie
médievale], consacrée au livre d’Etienne Gilson, L’Esprit
de la philosophie médievale.
Le 5 mai, il fait une conférence sur Kierkegaard et Dostoïevski, qui
deviendra la préface de son livre sur Kierkegaard.
1936
Parution d’articles de N. Berdiaev, A. Lazarev, B. Fondane, A. Remizov,
et bien d’autres à l’occasion du 70ème anniversaire
de Léon Chestov. Fondation du Comité des amis de Léon Chestov
(président : L. Lévy-Bruhl, secrétaire : B. de Schloezer,
membres : N. Berdiaev, P. Desjardin, A. Dobry, N. Eitington, J. de Gaultier, A.
Lazarev, J. Paulhan) qui organisa pour commémorer cet anniversaire une
souscription en vue de publier la traduction française du livre sur Kierkegaard
que Chestov avait achevé l’année précédente.
Entre le 23 mars et le 19 mai il voyage en Palestine, où il est invité
pour une tournée de conférences.
En juillet, le volume , Kierkegaard et la philosophie existentielle est
publié chez J. Vrin (le manuscrit russe original ne sera publié
qu'en 1939).
1937
Entre le 3 avril et le premier mai, il fait cinq conférences à
la Radio Paris, sous le titre L'Oeuvre de Dostoïevski.
Entre le 21 octobre et le 25 novembre il fait une autres série de conférences
sur Kierkegaard – philosophe religieux, à la Radio Paris.
A la fin décembre, il a souffre d'une hémorragie intestinale don’t
il ne se remettra que très lentement.
1938
Publication d'Athènes et Jérusalem, recueil d'études écrites
entre 1928 et 1937, pour la plupart déjà publiées. Le texte
allemand est publié à Vienne (en avril ou mai, la même année).
Chestov considérait comme son oeuvre capitale cet ouvrage où l'opposition
entre connaissance et foi est plus profonde que jamais. Le texte russe d'Athènes
et Jérusalem ne paraîtra qu'en 1951.
Dans ses dernières années, il s'initie à la philosophie hindoue
qu'il découvre, par bien des aspects, proches de sa pensée.
En automne, son article à la mémoire de E. Husserl, décédé
le 26 avril 1938, paraît dans la Revue philosophique.
Le 20 novembre, il meurt à Paris (clinique Boileau). Il est enterré
le surlendemain au nouveau cimetière de Boulogne.
Le 18 décembre, une rencontre à la mémoire de Chestov a lieu
à l'Académie pour la religion et la philosophie. Parution des articles
de N. Berdiaev, A. Remizov, I. Mandelstam, B. de Schloezer, G. Adamovich etc.
A Jérusalem, M. Buber tient un discours à la mémoire de Chestov.
En décembre, le Comité pour la publication de l'oeuvre de Chestov
est fondé. Depuis, 13 volumes de ses oeuvres sont publiés, et de
nombreuses re-éditions et traductions sont parus dans differents pays (voir
bibliographie). Les archives de Chestov, qui sont restés en grande partie
inédites, se trouvent à la Bibliothèque de la Sorbonne.